Ces chercheurs de l’Université de Harvard viennent de découvrir l'existence de « mystérieuses » bactéries qui décomposent le cholestérol dans l'intestin. Alors que ces dernières années de recherche intensive sur le microbiote intestinal ont permis de préciser les multiples fonctions d’espèces plus connues comme E. coli, beaucoup d'autres communautés forment ce que les scientifiques appellent la « matière noire microbienne » et restent « insaisissables ». Et, au sein de cette masse noire, une espèce bactérienne qui peut affecter le taux de cholestérol chez l'Homme. Des travaux publiés dans la revue Cell Host and Microbes, qui ouvrent une piste de recherche importante pour lutter contre l’hypercholestérolémie, le premier facteur de risque cardiaque.
« Le métabolisme du cholestérol par ces microbes pourrait en effet jouer un rôle crucial dans la réduction des niveaux de cholestérol intestinal et sanguin, qui affectent directement la santé », commente Emily Balskus, professeur de chimie et de biologie à l'Université de Harvard, coauteur avec Ramnik Xavier du Broad Institute, codirecteur du Center for informatics and therapeutics au MIT et chercheur au Massachusetts General Hospital (MGH). En effet, d’une part, seule une partie des personnes présentant une hypercholestérolémie sont traitées, et certains traitements, comme les statines, peuvent entraîner des effets indésirables. Les bactéries découvertes vont ouvrir une nouvelle option pour gérer les taux de cholestérol- grâce à des probiotiques ou de nouveaux traitements basés sur la régulation du microbiote.
Cet autre organe, le microbiome, pourrait réguler le taux de cholestérol
- Les chercheurs se sont inspirés d’une précédente étude ayant apporté les premières preuves de bactéries consommant du cholestérol-et vivant chez le porc. Mais il s’agissait bien de bactéries vivant dans le microbiote des porcs et non des humains.
- Un autre indice important est le « coprostanol », le sous-produit du métabolisme du cholestérol dans l'intestin. Or la bactérie identifiée chez le porc produit ce même métabolite.
Identification d’un gène du métabolisme stéroïde intestinal : l’équipe a donc cherché à identifier les gènes responsables de cette activité, en espérant trouver des gènes similaires dans l'intestin humain. D’autres collaborateurs ont également recherché des indices dans des grandes bases de données génétiques humaines. Finalement, l’équipe a identifié un candidat nommé « le gène du métabolisme stéroïde intestinal A » (IsmA). Ainsi, la présence ou l'absence de bactéries portant ou pas IsmA peut être rapprochée des taux de cholestérol sanguin : d’ailleurs, à l'aide de bases de données sur le microbiome humain provenant de Chine, des Pays-Bas et des États-Unis, les chercheurs montrent les personnes porteuses du gène IsmA dans leur microbiome ont des niveaux réduits de 55 à 75% de cholestérol dans leurs selles vs les personnes non-porteuses.
Les personnes qui « ont » cette activité enzymatique dans leur intestin ont aussi moins de cholestérol
Une découverte qui pourrait conduire à de nouvelles thérapies, comme des probiotiques ou encore l’administration directe d'enzymes dans l'intestin. Mais si l’étude identifie l'enzyme clé, les chercheurs devront aussi identifier les bactéries clés, porteuses de l’enzyme et directement responsables de la baisse des niveaux de cholestérol chez l'Homme.
Enfin, il faudra également préciser l'effet du coprostanol, sur la santé humaine.
Source: Cell Host and Microbes 15 June 2020 DOI : 10.1016/j.chom.2020.05.013 Cholesterol Metabolism by Uncultured Human Gut Bacteria Influences Host Cholesterol Level
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