Cette équipe de la Cleveland Clinic vient de découvrir une infection microbienne qui empêche la guérison de la maladie de Crohn : un type de levure couramment trouvé dans le fromage et la viande, présent à niveaux élevés dans les zones muqueuses non cicatrisées de patients atteints. Une découverte, présentée dans la revue Science, qui suggère de nouvelles approches de traitement de la MICI.
L’auteur principal, le Dr Thaddeus Stappenbeck, Chef du Service Inflammation et Immunité du Cleveland Clinic Lerner Research Institute et ses collègues de l'Université de Washington, du Cedars-Sinai Medical Center et du Dartmouth College, constatent que les niveaux de levure Debaryomyces hansenii sont plus élevés chez les patients atteints de la maladie de Crohn.
D. hansenii s’avère particulièrement abondante dans les zones enflammées du côlon et de l'intestin grêle ou plaies intestinales non cicatrisées.
Une cicatrisation altérée des plaies favorise une inflammation chronique.
Ces 2 caractéristiques clés des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) pourraient être au moins en partie expliquées par ce microbe intestinal. Cibler cette infection pourrait donc être une approche viable pour traiter ou prévenir les MICI.
- Les chercheurs analysent des biopsies de tissu intestinal de patients atteints ou non de la maladie de Crohn : ils relèvent une forte présence de D. hansenii dans la plupart des échantillons malades, vs seulement 10% des échantillons sains ;
- dans une autre cohorte de patients, les chercheurs séquencent l'ADN génomique de biopsies de différentes régions intestinales de patients atteints de la maladie de Crohn : ils constatent que D. hansenii est présente à des niveaux plus élevés dans les régions enflammées des intestins vs zones saines biopsiées chez le même patient.
Quels mécanismes ? L’étude de souris modèles de cicatrisation intestinale altérée représentatives des lésions intestinales observées chez les patients atteints de la maladie de Crohn, constate que les niveaux de D. hansenii sont également significativement plus élevés dans les plaies non cicatrisées. La levure se développait dans ces plaies plutôt à proximité des macrophages.
D. hansenii n'est pas globalement pro-inflammatoire : la levure contribue plutôt à la MICI en augmentant les niveaux d'une cytokine spécifique appelée CCL5 (chimiokine ligand 5). Les chimiokines telles que CCL5 sont nécessaires pour recruter d'autres cellules inflammatoires. Cibler CCL5 ou la levure elle-même pourrait constituer une approche thérapeutique efficace chez les patients atteints de la maladie de Crohn, infectés par D. hansenii.
D’autres études seront nécessaires pour comprendre pourquoi D. hansenii est sans danger chez les individus en bonne santé et son rôle précis dans le développement de la maladie de Crohn, en particulier via ses interactions avec d'autres composants du microbiome et du système immunitaire.
Source: Science 12 Mar 2021 DOI: 10.1126/science.abd0919 Debaryomyces is enriched in Crohn’s disease intestinal tissue and impairs healing in mice
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